Même avec un diplôme du supérieur, les jeunes issus des zones sensibles restent très discriminés à l’embauche.
Bercy les réunit avec des DRH pour faire bouger les lignes.

Ils sont les oubliés de la méritocratie et le symbole des rendez-vous ratés entre l’entreprise et la banlieue : les jeunes diplômés bac + 2 à bac + 5 issus des zones urbaines sensibles (ZUS), en dépit de qualifications recherchées, sont deux fois plus au chômage que les autres. Leurs cas rappellent le poids des discriminations à l’embauche liées aux origines ou à l’adresse. Une étude de l’Institut Montaigne, publiée en octobre et basée sur du testing, concluait qu’en France, à profils similaires, « Mohammed » a quatre fois moins de chances d’être recruté que « Michel ». Une honte, mais aussi une hérésie économique, à laquelle Emmanuel Macron, ministre de l’Economie, veut s’attaquer en organisant ce vendredi, à Bercy, une conférence réunissant plusieurs centaines de « jeunes talents issus de la diversité » et des DRH de grandes entreprises (Orange, Capgemini, Crédit Agricole, Casino, Vinci, etc.).

« Un fléau social »

L’événement, organisé avec le cabinet de recrutement Mozaïk RH et l’association Passeport Avenir, spécialistes de la diversité, vise à « donner une impulsion aux entreprises, non par un discours punitif mais en valorisant au contraire le talent de ces jeunes », explique l’entourage d’Emmanuel Macron. Alors qu’ « on parle toujours des quartiers difficiles sous l’angle social, il faut aussi aborder la question par l’angle économique », poursuit-on à Bercy. Le ministre en profitera pour rappeler les efforts entrepris en faveur de l’entrepreneuriat dans les quartiers prioritaires et appeler les jeunes à se saisir de ces opportunités. Mais aucune annonce n’est attendue : les mesures prises par le gouvernement en mai dernier sont déjà en cours de déploiement et Emmanuel Macron estime que « l’amélioration passera plus par un changement de culture que par un texte de loi ». « La mobilisation du ministre est un signal fort envoyé au monde économique. La discrimination est un fléau social qui appelle une réponse collective », insiste Saïd Hammouche, PDG fondateur de Mozaïk RH.

Reste que le plan dévoilé en mai dernier tarde à produire ses effets. Le contrat aidé « starter », pour les entreprises accueillant des jeunes de ZUS, monte bien en puissance, tout comme le dispositif de « garanties jeunes », mais ils ciblent, comme toujours, les seuls jeunes peu ou pas qualifiés. Surtout, la principale mesure prévue pour lutter contre les discriminations, l’instauration d’actions de groupe, n’est toujours pas en place, même si Myriam El Khomri tente d’y remédier (lire ci-dessous). La ministre du Travail, qui sera aussi présente et voit une nouvelle fois Bercy empiéter sur son pré carré, prépare également le lancement, fin février, d’une opération de testing auprès de 50 grands groupes (+ de 1.000 salariés) et, fin mars, d’une campagne nationale de sensibilisation à la lutte contre les discriminations à l’embauche.

Derek Perrotte, Les Echos

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