Qui sommes-nous

Arabe : […] on leur reproche leur triste gravité, une indifférence qui va jusqu’à la cruauté. Intolérants par principes jusqu’au fanatisme, les premiers musulmans se croyaient les instruments de la justice divine, et étaient impitoyables pendant la guerre. […]

Nouveau dictionnaire universel, Maurice La Châtre, 1865

Les premiers musulmans décrits dans cette définition sont en réalité ceux qui furent l’objet des confrontations lors des croisades. Après la perte de Jérusalem en 1187, les croisés ont dû justifier leur défaite de retour en occident. C’est alors que le discours sur le fanatique musulman, cruel et intolérant, incarné par la figure de Saladin, arriva en Europe. Plus de 600 ans plus tard, la définition des arabes faite par Maurice La Châtre laisse encore transparaître cette vision qui continue d’impacter notre imaginaire actuel.

Les discours sur les « musulmans modérés » largement répandus aujourd’hui sont l’incarnation même de cet imaginaire sur le fanatisme dont aucun musulman arabe ne serait exempt. Il vient poser la norme sur le fanatisme, faisant de tous les non fanatiques une exception heureuse. Cette inversion de la réalité est directement issue de cette croyance diffusée depuis des siècles et réalimentée par les tragiques attentats qui ont frappé la France en 2015.

Et disons clairement les choses : derrière le terme de musulman, la majorité des Français y voient l’arabe. Pas l’Indo-pakistanais, pas l’Indonésien, pas le Sénégalais ni le Bosniaque qui sont pourtant pour la plupart des musulmans. Notre histoire fait que le musulman et l’arabe sont confondus dans nos discours, nos analyses, notre lecture de la société.

Avoir conscience de ces éléments dans le monde de l’entreprise, principal lieu de confrontation à l’Autre, est essentiel. Le regard suspicieux, induit par cet héritage de croyance et par l’augmentation de la radicalisation réelle de certains musulmans, doit être travaillé au risque de produire des tensions incoercibles. Nos comportements sont inévitablement influencés par le regard de l’Autre et nos croyances peuvent induire des comportements qui rendent le conflit inéluctable.

Là est toute la difficulté pour une entreprise : gérer des cas de radicalisation sans que la majorité n’en subisse les conséquences au quotidien.

Etienne Allais