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Lundi 12 novembre, l’AFMD présentait la sortie de son nouveau livre « Le racisme et la discrimination raciale au travail », écrit par Anaïs Coulon, Dorothée Prud’homme et Patrick Simon.

Vous n’y étiez pas ? Pas de panique, le livre et les supports pour agir sont disponibles ici :

http://www.afmd.fr/Sortie-du-livre-sur-le-racisme-et.html

C’est un travail en profondeur du sujet grâce à 43 entretiens et une bibliographie très riche, sans tabous, qui explore toutes les facettes du racisme, de l’antisémitisme et des discriminations raciales qui peuvent exister en entreprise.

L’usage d’une langue non sexiste qui utilise les épicènes, le point médian quand celui-ci n’alourdit pas la lecture ou encore la règle de proximité dans les accords donne une lecture agréable tout en démontrant que c’est possible.

Les verbatim qui illustrent les arguments tout au long du livre permettent d’incarner le sujet à travers des exemples vécus dans les entreprises.

Vous y trouverez en conclusion des propositions d’actions clairs et pertinentes organisées autour de cinq axes :

Voici en complément du livre mon avis sur le sujet, fruit de mon expérience en tant que directeur de SOS Racisme et de mes activités récentes de consultant.

Un tabou français !

Ce sujet est, pour de nombreuses raisons historiques, un tabou français. L’immigration d’après-guerre est majoritairement issue de pays colonisés militairement sous couvert du racisme au XIXème siècle et au début du XXème. C’est bien au nom du racisme que Jules Ferry explique la colonisation à l’Assemblée Nationale en 1885 en affirmant notamment « Nous avons le devoir de coloniser les races inférieurs ». Cette idéologie s’est diffusée longtemps. Des livres scolaires utilisés dans les années 50 décrivaient et expliquaient encore les différentes « races » et leurs prétendues inégalités.

La société française post-raciale des années 80 s’est construite dans le consensus, en essayant d’oublier et de faire oublier ces réalités, ce qui a eu pour effet une interdiction du racisme sans pour autant permettre de déconstruire les nombreux stéréotypes associés à cette idéologie.

Les entreprises sont donc face à un phénomène qui les dépasse très largement, tout en devant le prendre en compte.

Concrètement, voici un exemple que j’ai vécu lors d’une formation dans une entreprise :

Un salarié me demande comment réagir face à des remarques sur les juifs, me laissant sous-entendre qu’il était lui-même visé. Jamais il ne me parle d’antisémitisme ou de racisme mais plus de remarques bêtes et de préjugés.

La DRH, présente à la formation, réagit en lui disant que de tels propos sont inacceptables et qu’il doit aller la voir pour qu’il y ai un traitement RH adapté à la situation.

Juste réaction, me direz-vous.

Sauf que le salarié lui répond qu’il n’ira pas la voir, justement parce qu’il ne veut pas d’une intervention RH. Il apprécie son collègue globalement et considère qu’il est face à de la bêtise.

Il se retourne alors vers moi et me demande des outils argumentatifs pour déconstruire méthodiquement les stéréotypes auxquels il fait face, notamment sur le lien juif-argent, ce que je fais.

Quelles conclusions ? 

Cet exemple illustre les limites de l’intervention RH sur ces sujets. Les personnes victimes de propos racistes (juridiquement parlant) font souvent d’eux-mêmes la distinction entre ce qu’ils pensent relever de l’idéologie ou ce qui relève des préjugés, ce que les procédures RH peuvent difficilement faire. On doit leur offrir une politique RH intransigeante sur le sujet mais on ne peut pas les contraindre de s’en saisir.

Cet exemple illustre également des demandes complémentaires à celle de la protection juridique sur le lieu de travail que sont les outils et les actions des employeurs pour déconstruire les stéréotypes. On pense souvent que les personnes qui subissent ces remarques racistes, sexistes, homophobe… sont « armées » pour déconstruire les stéréotypes, alors que ce n’est pas forcément le cas.

C’est le rôle de l’Etat me direz-vous… C’est juste !

Mais comme le disais le Défenseur des Droits ce lundi 12 novembre, cela ne changera que si ces sujets sont réellement incarnés par les représentants politiques, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui selon lui. En attendant, vous pouvez y contribuer par de nombreuses actions comme la diffusion de contenus (films, documentaires, livres…), l’organisation d’expositions (par exemple celle de Pascal Blanchard sur les Zoos Humains), de conférences sur l’origine des stéréotypes ethno-raciaux (que je propose ), d’ateliers ou de formations.

A ce sujet, découvrez ma nouvelle formation ludique et interactive pour apprendre à déconstruire les préjugés :

« Déconstruire les préjugés au quotidien : quelles techniques, quels arguments ? »

Si la société change lentement sur ce sujet, vous pouvez faire changer vos sociétés plus rapidement !

Etienne Allais