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L’Assemblée nationale examine, lundi 14 et mardi 15 mai, un projet de loi renforçant la lutte contre les violences sexistes et sexuelles, défendu par la ministre de la justice, Nicole Belloubet, et la secrétaire d’Etat chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, Marlène Schiappa. Certains points du texte suscitent la déception des associations de défense des droits des femmes et de protection de l’enfance. En voici les principales mesures.

L’objectif est de laisser davantage de temps pour porter plainte aux victimes, d’autant plus traumatisées qu’elles étaient mineures au moment des faits.

Quelques associations réclament l’imprescriptibilité pour les crimes sexuels sur les mineurs, en raison des très longues années nécessaires à certaines victimes pour briser le tabou et parler, voire de l’amnésie traumatique de certaines d’entre elles.

Les amendements allant dans ce sens ont été rejetés lors de l’examen du texte en commission des lois, mercredi 9 mai, en raison des difficultés à apporter des preuves d’un crime après des dizaines d’années, mais aussi parce qu’une telle mesure introduirait des incohérences dans les règles de prescription des différents crimes.

C’est l’article qui suscite le plus de controverse. Alors que l’instauration d’une présomption de non-consentement pour les mineurs de moins de 15 ans a pendant plusieurs mois été évoquée par le gouvernement, le texte ne retient pas cette option.

« En matière criminelle, il n’y a pas de présomption de culpabilité possible, défend la rapporteuse (LRM) de la commission des lois, Alexandra Louis. Le doute profite au mis en cause. C’est un principe fondamental de notre droit. »

La députée met en garde contre une censure du Conseil constitutionnel. « Quand une disposition est censurée, des victimes perdent l’opportunité de saisir le juge, explique-t-elle. Nous avons une responsabilité énorme. »

Le texte, modifié par la commission des lois, précise la définition du viol sur mineurs dans le code pénal, afin d’aider les juges à mieux caractériser l’infraction. « Lorsque les faits sont commis sur la personne d’un mineur de moins de 15 ans, la contrainte morale et la surprise sont caractérisées par l’abus de vulnérabilité de la victime ne disposant pas du discernement nécessaire pour consentir à ces actes », précise le projet de loi.

Dans le même temps, il porte à sept ans la peine pour atteinte sexuelle (qui sanctionne toute relation sexuelle entre un majeur et un mineur de moins de 15 ans, même sans violence, menace, contrainte ou surprise), et à dix ans en cas de pénétration. Cette disposition en particulier « pose un interdit civilisationnel clair sur les rapports sexuels entre majeurs et mineurs de moins de 15 ans », selon Marlène Schiappa.

Elle est cependant contestée par plusieurs associations, qui estiment qu’elle entraîne un risque accru de déqualification des viols sur mineurs en délits. Dans une lettre ouverte publiée lundi 14 mai, 250 personnalités, dont l’ancienne ministre des droits des femmes Yvette Roudy, l’écrivaine Geneviève Brisac, ou l’actrice Karin Viard, demandent le retrait de cette disposition.

C’est la disposition la plus consensuelle du texte. Le gouvernement prévoit que les délits de harcèlement sexuel et de harcèlement moral, punis respectivement de trois et deux ans de prison, seront constitués « lorsque ces propos ou comportements sont imposés à une même victime de manière concertée par plusieurs personnes, alors même que chacune de ces personnes n’a pas agi de façon répétée ».

La commission des lois a ajouté que les faits seraient caractérisés « lorsque ces propos et comportements sont imposés à une même victime, successivement, par plusieurs personnes qui même en l’absence de concertation, savent qu’ils caractérisent une répétition ».

L’objectif est de mieux sanctionner les « raids numériques », des attaques coordonnées menées en ligne, dont les auteurs échappent aujourd’hui aux poursuites, car ils n’ont pas agi de façon répétée.

Sanctionner le harcèlement de rue faisait partie des promesses de campagne d’Emmanuel Macron. Le projet de loi crée une infraction d’outrage sexiste inspirée de la définition du harcèlement sexuel – c’est-à-dire le fait d’imposer à une personne des propos ou des comportements à connotation sexuelle qui portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, ou créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante.

Cette infraction sera sanctionnée d’une amende de 90 euros, pouvant aller jusqu’à 3 000 euros en cas de récidive. La mesure est plutôt bien accueillie, même si des doutes s’expriment sur son application, l’infraction devant être constatée en flagrance.

Un amendement de la rapporteuse adopté en commission étend le champ des personnes habilitées à dresser des procès-verbaux. En plus des officiers et agents de police judiciaire, les agents de police judiciaire adjoints (agents de police municipale, adjoints de sécurité…), ainsi que les agents de sécurité de la SNCF et de la RATP pourront constater l’infraction.

En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/societe/article/2018/05/14/violences-sexistes-et-sexuelles-ce-que-contient-le-projet-de-loi-examine-par-l-assemblee-nationale_5298680_3224.html#FQXMb8XFC6gvuqZG.99