L’association SOS-Homophobie, qui publie mercredi son baromètre annuel de la haine anti-LGBT, a reçu 1 575 témoignages en 2016, soit 19,5 % de plus qu’en 2015.
L’association publie mercredi 10 mai son rapport annuel, unique baromètre de l’évolution de la haine anti-LGBT (lesbiennes, gais, bi et trans). Le constat est sombre. Elle a reçu 1 575 témoignages d’actes homophobes ou transphobes en 2016, soit 19,5 % de plus qu’en 2015.
Les agressions physiques perdurent : 121 cas ont été rapportés. Elles ont lieu le plus souvent dans l’espace public.
« Se définissant comme “lesbienne et garçon manqué”, la jeune Leila nous contacte pour raconter son quotidien dans son quartier et au collège : les insultes – “erreur de la nature”, “travelo” –, les crachats, les bousculades et les agressions répétées. Un jour, elle s’est retrouvée à terre pendant qu’un groupe de personnes la frappait du pied », rapporte l’association.
Autre exemple : « En décembre 2016, un couple sort d’une boîte gay de Metz et est violemment agressé par cinq personnes d’une vingtaine d’années. Le groupe a déclaré vouloir “casser du PD”. Une des victimes a été rouée de coups à terre. » Dans cette affaire, une femme et trois hommes ont été interpellés début janvier.
« Ce n’est pas ce que le bon Dieu veut »
L’homophobie « au quotidien » persiste également. Elle est d’abord le fait de la famille et de l’entourage proche (15 % des témoignages). Aziz, qui s’interroge sur sa sexualité, rapporte les dires de son cousin : « Si j’ai un homosexuel dans ma famille, je lui plante un couteau dans le cœur. » Romain relate, lui, que ses parents l’ont traité de « débauché » à l’annonce de son homosexualité. « Ce n’est pas ce que le bon Dieu veut », ont-ils dit, offrant de lui « payer un abonnement à Meetic pour Noël pour redevenir hétéro ».
Le quartier, le lieu de travail, l’école, les commerces sont également le théâtre d’insultes, de harcèlement, de discriminations et de vexations.
Un propriétaire a ainsi dit à Kim et Joanna qu’il ne souhaitait pas louer à des couples homosexuels : « En tant que bon père de famille, je ne veux pas avoir à expliquer ça à mes enfants. » Les deux mères de Noémie, 4 ans, ont relaté leur inquiétude pour leur fille qui rencontre des difficultés à l’école. Des camarades lui ont expliqué que « c’est interdit d’avoir deux mamans ». L’institutrice s’est dérobée et a dit ne pas vouloir « prendre parti ».
Il arrive que les forces de l’ordre refusent d’enregistrer une plainte ou minimisent le caractère homophobe d’une agression. « C’est la double peine pour la victime, constate M. Deumier. Un gros travail de formation des agents publics a été entrepris. Il doit être poursuivi. »
« Internet est un défouloir »
Fait marquant, les témoignages d’actes transphobes ont doublé en 2016 (121 contre 63). L’année a été marquée par l’adoption d’une proposition de loi démédicalisant le changement de sexe à l’état-civil des personnes transgenres. La médiatisation du sujet peut expliquer ce regain, mais peut-être aussi une plus grande propension à témoigner pour les individus visés.
L’association n’est pas étonnée de cette recrudescence générale. Pourtant, la banalisation de l’homosexualité et de l’homoparentalité a progressé depuis la loi Taubira de 2013.
Un sondage IFOP publié en septembre 2016, réalisé auprès de 2 274 personnes, montrait que les deux tiers des personnes interrogées souhaitaient le maintien de la loi sur le mariage pour tous ; 63 % estimaient qu’un couple avec ses enfants « constitue une famille à part entière ». « La majorité des Français fait en effet preuve d’ouverture, observe M. Deumier. Mais un discours minoritaire homophobe et bruyant persiste. »
Le militant en veut pour preuve le nombre de signalements effectués pour des propos homophobes sur Internet : 320 cas en 2015. L’homophobie y ressurgit souvent à propos de l’actualité – le débat sur l’ouverture du don du sang aux homosexuels, l’attentat d’Orlando (Floride) en juin 2016, la polémique à propos des affiches de prévention contre le VIH…
« Internet est un défouloir », résume le rapport. Twitter restait, en 2016, le site dont les contenus sont le plus souvent signalés, mais tous les réseaux sont touchés. Sur Facebook, « il est difficile de s’exposer en tant que personne LGBT : se faire insulter, harceler voire menacer est encore une chose commune lorsqu’on ne prend pas garde à rendre son profil privé », poursuit l’association.
Pour SOS-Homophobie, les moyens consacrés à la modération par les principales plateformes Internet sont insuffisants. « Il faut prendre conscience de l’effet dévastateur de cette homophobie sur Internet, poursuit M. Deumier. Quand vous êtes jeune, gay et sans accès à d’autres sources d’information, vous pouvez facilement vous sentir isolé. »
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