4 % en moyenne. C’est la part d’administrateurs dont l’origine est autre que française ou blanche dans les conseils d’administration des sociétés du CAC40 et du SBF120. C’est ce que révèle le premier baromètre de la diversité dans la gouvernance des entreprises françaises réalisé à l’initiative du Club XXIe siècle et présenté ce 5 décembre à Bercy. Une part extrêmement faible qui pénalise la performance des entreprises.
Les conseils d’administration des grandes entreprises françaises cotées souffrent d’un manque flagrant de diversité. Le club XXIe siècle, une association qui défend l’égalité des chances et la méritocratie dans le monde économique et politique, en apporte la preuve avec le lancement de son baromètre sur la gouvernance des entreprises françaises. Il sera présenté le mardi 5 décembre au ministère des Finances, en présence du ministre de l’Économie Bruno Lemaire. Novethic vous en dévoile en exclusivité la teneur concernant la diversité des origines.
4 % seulement des administrateurs du CAC40 et du SBF120 sont non-français et/ou non-blancs. Une moyenne qui cache une réalité très différente selon les entreprises : 70 % des établissements du panel ne comptent aucune personne d’origine différente dans leur conseil d’administration, une vingtaine d’entreprises en compte entre 1 et 10 % avec un maximum à 25 % pour une des entreprises du CAC40.
Mesurer pour faire bouger les lignes
Pour réaliser ce baromètre, le club XXIe siècle a mesuré, de façon « empirique », la diversité des origines des conseils d’administration en se basant sur les photos des administrateurs et leur parcours migratoire (nom et nationalité d’origine). Il existe une marge d’erreur mais « l’ordre de grandeur est là », assurent les auteurs de l’étude.
Ceux-ci ne pouvaient en effet s’appuyer sur aucunes autres données sachant qu’il n’est pas possible en France de réaliser des statistiques fondées sur un référentiel ethno-racial. Ce n’est pas le cas dans d’autres pays, comme les États-Unis, où les entreprises fournissent régulièrement des statistiques sur les origines de leurs employés.
« La méthode utilisée ne prétend pas à une scientificité absolue mais il s’agit d’un premier indice de perception de cette diversité », souligne de son côté Elyès Jouini, vice-président de l’université Paris-Dauphine et co-auteur d’un rapport sur la gouvernance et la diversité pour l’Institut français des administrateurs (1). « Il est important, lorsque l’on a un sujet de société comme celui-ci, d’être en mesure de le quantifier et d’évaluer les progrès. Cela permet notamment aux entreprises de se comparer et de s’améliorer ».
Diversité et performance
« Nous n’avons pas l’intention de faire voter une loi pour faire changer les choses, nous préférons être dans la co-construction pour faire évoluer les mentalités, précise Tong Chhor, membre du bureau du club XXIe siècle (2). Ce que nous voulons démontrer avec cet état des lieux, c’est qu’il n’y a pas d’égalité des chances entre les personnes de différentes origines ».
Le manque de diversité n’est pas qu’un « problème social mais c’est aussi un enjeu de compétitivité. De nombreuses études prouvent que la diversité en entreprise amène plus revenus, d’innovations et de bien-être au sein des entreprises (1). Et l’on ne peut pas rester entre soi pour aller chercher des marchés à l’étranger », souligne Eric Del Cotto, membre du conseil d’administration du club (2).
« Par ailleurs, il est important que le top management comme les organes de gouvernance reflètent aussi la diversité des clients, des collaborateurs. Cela est loin d’être le cas aujourd’hui », poursuit Redouan Znagui, membre du Club XXIe siècle et l’un des auteurs de l’étude (2).
Le club XXIe appelle les entreprises à se saisir du sujet
« Pour que diversité rime avec performance, il est essentiel qu’elle reflète une réelle démarche d’ouverture et d’intégration de la part de l’entreprise, une meilleure compréhension des enjeux, des cultures, etc. Il est essentiel qu’il s’agisse d’une démarche d’ouverture et d’intégration de la part de l’entreprise », précise Elyès Jouini. « S’intéresser à cet organe de gouvernance, c’est s’intéresser au cœur du réacteur de l’entreprise. S’il y a une diversité en son sein, ce ne peut pas être le fait du hasard. C’est le reflet de la maturité de l’entreprise sur le sujet », assure l’universitaire.
Après la parution de son annuaire des administrateurs indépendants reflétant la diversité l’année dernière, cette première édition du baromètre, que le Club XXIe siècle qualifie lui-même de pilote, est un nouveau pas pour faire avancer ce sujet. Il sera amené à évoluer grâce à des partenariats académiques ainsi qu’avec les entreprises souhaitant s’engager.
Lors de la présentation du baromètre le 5 décembre, BNP Paribas doit d’ailleurs présenter sa feuille de route pour plus de diversité dans les conseils d’administration des filiales. Le Club appelle toutes les entreprises cotées à faire de même.
Béatrice Héraud @beatriceheraud
(1) Gouvernance et diversité dans les conseils d’administration
(2) Tong Chhor est Vice-président des opérations d’Everteam, Eric Del Cotto est directeur général de la région Europe du Sud, Moyen Orient et Afrique d’Owen Mumford et Redouan Znagui est directeur financier et membre du Comité Exécutif de la banque de détail à l’international chez BNP Paribas